Rome (AAP) – Le 29 septembre, Iskander, avoyer de la République libre de Genève a adressé un courrier à l’Église concernant l’évêque de la cité, monseigneur Tibère d’Arcis.
Dans ce courrier, l’avoyer de Genève demande à Rome d’intervenir afin de démettre monseigneur Tibère qui, selon ses mots, « ne convient pas du tout à la ville et à ses gens ». Son propos est sans équivoque concernant le prélat et il se dit même « particulièrement déçu par lui. » et demande également aux religieux romains : « pourquoi nous avez-vous envoyé un tel prélat ?». Outre ce discours décrivant la déception que revêt à ses yeux la nomination de ce prélat, Iskander affirme qu’il nourrit à l’attention des dirigeants de l’Église aristotélicienne romaine « l'espoir » de « réorienter » l’action à Genève. Cette missive est adressée au pape, aux cardinaux et aux évêques, prouvant ainsi que l'avoyer interpelle le gouvernement de l'Église romaine dans son ensemble. Dans sa lettre ouverte, Iskander s’adresse clairement aux gouvernants de la cité papale en ces termes : «rappelez votre évêque ». C'est donc l'action de l'évêque et, au travers de celle-ci, les choix de Rome qui sont remis en question par le dirigeant Helvète.
Au delà de la question des conflits religieux, qui ne date pas d’hier à Genève, vient se greffer une question d'ordre judiciaire. En effet, dans sa lettre, l’avoyer explique que Genève est dotée d’une charte de prime allégeance stipulant que toute personne se présentant aux élections municipales doit avoir préalablement fait allégeance à la ville. L’avoyer indique que monseigneur Tibère a enfreint la loi en se portant candidat à l’élection municipale sans prêter serment. En plus de cette première affaire, une seconde vient s'ajouter. La ville de Genève est dotée d’un simultaneum qui organise les cultes religieux au niveau municipal. Au terme d’une élection, la cathédrale de la cité est partagée entre les représentants élus de chaque culte. Iskander explique à ce sujet que « si un des cultes n'a pas de représentant à Genève, son culte ne peut être célébré dans les lieux de cultes ». L’avoyer assure que monseigneur Tibère a refusé de se présenter, ce qui empêche le prélat de jouir de l'utilisation de la cathédrale.
Aux accusations, Tibère répond sans ambiguïté. Il décrit l'avoyer comme « un manipulateur » et le suspecte d'être « membre de la secte des brigands du Lion de Juda ». Il explique que la réaction de Rome a été prompte en sa faveur mais que l'homme « n'en restera pas là car il aime s'entêter dans l'erreur ». Aux accusation selon lesquelles il aurait enfreint la loi municipale concernant les élections, il oppose son innocence expliquant que « le serment d'allégeance est obligatoirement prêté lorsque le maire entre en fonction » alors qu'il n'était que candidat. Lors du procès, il a été stipulé qu'un « clerc ayant prêté allégeance à Rome n'a pas à jurer fidélité à Genève ». Le prélat ajoute qu'il n'a pas été entendu, selon lui, parce que « le juge est un brigand du Lion de Juda ». Sur le plan du simultaneum, monseigneur Tibère exprime son indignation en indiquant que « cela revient en fait à une confiscation pure et simple par la mairie d'un bâtiment construit bien des années auparavant par l'ensemble des fidèles Genevois, eux-mêmes confiants en l'autorité romaine ». Il regrette que les « hérétiques [...] aient choisi d'agir au grand jour et par la force en spoliant les biens de la communauté aristotélicienne ». Sur la question de la volonté du gouvernement genevois à organiser les affaires spirituelles, il répond que le fait que la cité « s'arroge des droits religieux poursuit un but simple : asseoir son pouvoir non seulement sur les corps mais aussi sur les âmes. »
Monseigneur Tibère d'Arcis évoque sa difficulté à mener à bien la mission pour laquelle il a été élu. L'homme, emprisonné pour une durée de huit jours est dans l’impossibilité d'officier. Il estime qu'il va devoir prêter attention à ses « moindres faits et gestes » révélant que les dirigeants de la république de Genève, qu'il tient pour hérétiques, « n'attendent qu'un faux pas » pour le « traîner à nouveau en justice ». Il fait état de menaces de procès « pour avoir osé afficher sur la porte de la cathédrale un avis signalant le retour des messes In Gratibus ». Si l'évêque ne craint pas pour sa vie, il dit qu'il ne serait « pas surpris de recevoir un jour un coup de poignard dans le dos ». Le prélat parle d'un « climat de terreur qui règne sur Genève » pour les fidèles aristotéliciens. Il ajoute que « personne n'ose parler en public de sa foi de peur de se retrouver en procès » et que réciter « le credo aristotélicien à voix haute » peut vous valoir des « menaces d'empalement ».
Enfin, par la voix de Ludovi de Sabran, cardinal romain électeur, une première réponse a été faite par l'autorité du Vatican. La réponse explicite que « Genève ne peut pas prétendre accepter la Très Sainte Église et lui imposer un fonctionnement qui contrevient à son Dogme et à son Droit Canon ». L'annonce explique aux dirigeants de la cité helvétique que la mission de l’Église est sacrée et que le pouvoir « temporel ne peut que s’y soumettre ». Il ajoute sans détours que le supérieur de la communauté aristotélicienne à Genève « est et reste Monseigneur d’Arcis ». Il conclut sa missive en ordonnant « la levée de ce jugement inique et l’abrogation de ces lois hérétiques au nom du Très Haut ».
Il ne fait aucun doute que la situation reste tendue entre le pouvoir temporel et le pouvoir spirituel aristotélicien. Les conflits religieux sont légions dans la cité helvétique et se sont souvent achevés par des opérations militaires. Les semaines à venir diront si monseigneur Tibère d'Arcis et l'avoyer de Genève, Iskander, sont parvenus à apaiser ces tensions délétères.
Padré, pour l’AAP