Genève (AAP) - Voilà, c'est fini. On a tant ressassé les mêmes théories. On a tellement tiré chacun de notre côté que voilà c'est fini. La même en latin, on aurait fait un requiem. Le moment est historique : pour la première fois, la ville de Genève autrefois Babylone, Sodome et Gomorrhe réunies, compte moins d'habitants et encore moins d'âmes qu'à Soleure. La maladie est incurable : Genève partage désormais le sort commun des Royaumes, celui de petits bourgs malades de la peste gouvernés par un édile prorogé par six suffrages exprimés. On s'écharpe à deux en halle pour savoir comment taxer les navires abandonnés à quai. Un curé Romain absent de la gargote y est reconduit sans concurrence. On a dressé la table de la concorde. La recette est sans saveur.

Toute la ville est occupée par les fossoyeurs de l'Histoire ? Toute ? Non ! Car un petit village dans la cité, peuplé d'irréductibles Suisses résiste encore à l'envahisseur. Maethor et ses compagnons navrent à loisir sur les routes de montagnes, distribuant et prenant les baffes. Aragorn, nouveau druide des alpages, distribue la potion magique. La Savoie met obtusément tous ses helvètes en procès ? Le diocèse est offert à discrétion d'un Empereur acoquiné à ses copains cardinaux ? Peu importe désormais : la Religion, c'est le gnon ! C'est radical et c'est plus simple pour relier les Hommes entre-eux.

Deux voyageurs italiens en font les frais sur les routes savoyardes lorsque l'armée "La crèche...non je ne vois pas" dirigée par le Capitaine genevois sort de Sion. En Dauphiné, une femme est tuée encore. Devant Aix, la troupe affronte l'armée d'Hersende de Provence. Cinq Suisses sont navrés mortellement. Deux en face. Les écorcheurs refluent en ordre et échappent à l'armée de la capitaine du Lyonnais Alexa. On les retrouve à Genève le 28 octobre, déménageant les coffres du conseil diocésain de l'évêque Quentin qui n'a soigneusement laissé que les miettes de ses ors et vit à Annecy.

En face, on pavoise. L'épouvantail des Suisses ressuscite les chambrées de bidasses, on fait des blagues de potache, on se raconte quelques vieilles histoires à la lumière du feu de camp. Suivre. Des ordres fusent, on dresse les piques, repousse la meute. On sonne l'hallali, fait trois lieues hors les murs puis rentre chez soi cultiver ses légumes, fiers comme Artaban, rassasiés du devoir accompli. Plus loin de là, au même moment, près de la forêt des Carnutes, dans d'autres chaudrons mijotent les mêmes épices : l'Armée "la Barbac" de l'angevin Plemeniti Unega, Gospodar ubistvo kralja est arrivée sur Blois. Ça fait rire les passants. Mais quand ils voient du sang sur leurs lames de rasoirs, ça fait comme un éclair dans le brouillard.

iZaac pour l'AAP agence Meuse, Saône et Rhône