Fribourg (AAP) - L'observateur attentif des affaires helvétiques ne doute plus désormais du dépérissement de ce territoire autrefois contremaître des histoires dans l'Aristotélité.

Son tournoi, jadis plus grand événement pacifique des royaumes, est délocalisé en Flandres, faute d'organisateurs en Suisse. Ses péripéties militaires qui en faisait la terre la plus redoutée des marges de l'Empire font désormais sourire jusque même la connétablie impériale qui n'a guère brillé pourtant par son activité militaire depuis Hadrien Ier, jusqu'à déléguer la bagarre contre les Genevois au voisin français. La Réforme, son sel spirituel, s'est dissout en fade saumure lorsque les théologiens ont laissé la place en enquiquineurs de curés tout juste bon à réclamer l'investiture indigène. Ses cantons enfin, se sont détournés les uns des autres et semble avoir délégué leur très chère souveraineté à un Conseil des XII qui n'en demande pas tant et s'en dédouane.

Aujourd'hui, la Suisse est administrée par un Conseil des II, Lordhammer et Notwen, économes de bureau qui se désolent de ne plus trouver autour d'eux d'âmes charitables pour éplucher les légumes.

Énième sollicitation ? La gargote helvétique fleurit une nouvelle fois d'un appel aux points d'Etat. Même 10, à votre bon cœur messieurs dames ! Le Chancelier helvétique aura réussi à forger une Suisse à l'image de son propre canton, Solothurn : une vallée administrée sans relief par un maire inamovible faute de relève, spécimen exemplaire de l'Etat modèle. Le prestige peine à être maintenu à 3,5*. La place de juge est vacante depuis plusieurs semaines, sans même un mot pour s'en désoler ou un avoyer pour s'en indigner.

Et les autres dans tout cela ? Les maires helvétiques sont bien plus blâmables encore dans ce triste Crépuscule. A claironner leur souveraineté pour finalement ne rien en faire, ils ont tari la vie locale.

On ne trouve plus guère à Grandson que 20 habitants et une halle désertée. Une malédiction ? L'héritage des Skarrides, petit clan de brigands qui sera parvenu à vider le canton. Les 90 âmes vives de 1465 auront fondu sous les mandats de Skarry et Yoska. Lucerne suit le même chemin, dans la main des « oiseaux », un clan de brigands allemands exclu des affaires du Conseil des XII. Schwyz se complaît dans son splendide isolement, vertueux et silencieux, sauf lorsqu'il faut dire « nein ». Sion n'est plus que l'ombre d'elle-même, administrée sans passion par un Yukimura que l'on n'entend plus. Comme glissant de l'Acropole au caniveau, Genève-la-Gargote a laissé la place à Genève-le-Marché. On s'y ébaubit en grattant 50 deniers sur la miche et en y jonglant avec les inventaires. Rentrée sans tambour ni tempête dans le giron de l'Eglise de Rome, on y applique les mêmes recettes qu'à la Curie et en Empire : ne rien dire, ne rien écrire, ne rien faire et les moutons seront bien gardés. Fribourg enfin, longtemps agitée par une coterie de brigands obnubilés par leur haine de la Reine de France, convulse encore un peu entre deux invectives fleuries des miraculés de cette affaires.

La Suisse semble s'en satisfaire de suivre le chemin de l'Empire dont les derniers Souverains auront réussi à saigner jusqu'à l'envie d'y régner. Konsar le dauphin succédera dans quelques jours à Thibaud-béni-oui-oui, sans même un challenger.


Jean-Kaiser Aristote pour l'AAP

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